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Rapport sur les restitutions du patrimoine culturel africain : « Une promesse a été tenue »

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Le rapport très attendu dans le monde de l’art sur les restitutions du patrimoine culturel africain, a été remis à la demande d’Emmanuel Macron ce vendredi 23 novembre. Il y a près d’un an, le Président français souhaitait que « d’ici cinq ans les conditions soient réunies pour des restitutions temporaires ou définitives du patrimoine africain en Afrique. » Après la remise de ce rapport, Aurélien Agbenonci, Ministre des Affaires Etrangères se prononce sur RFI.

 

RFI : Le rapport est remis ce vendredi après-midi, mais on en connaît déjà les grandes lignes. Il préconise une modification du code du patrimoine français afin de permettre la restitution définitive des milliers de biens culturels pillés en Afrique. Quelle est votre réaction ?

Aurélien Agbénonci : Ma première réaction c’est que, d’abord, une promesse a été tenue. C’est qu’il y ait une évolution du droit positif français. Cela va dans le bon sens.

Voilà plus de deux ans que vous militez pour ces restitutions. Vous avez lancé cette campagne du temps de François Hollande. J’imagine que vous devez vivre cela comme une petite victoire, non ?

Je ne dirais pas une victoire, je dirais que c’est une bonne avancée. C’est une victoire qui est commune aux partenaires, aux deux partenaires que nous sommes. Et il faut saluer le courage du président Macron, qui, le 9 novembre 2017, a osé dire une chose que je n’ai pas oubliée, lorsqu’il disait qu’il n’y a pas de justification valable, durable et inconditionnelle, que le patrimoine africain ne peut pas être uniquement dans les collections privées des musées européens. Je crois qu’il faut saluer ce courage-là et la démarche constructive qu’il a adoptée. Vous savez que c’est lors de la visite du président Patrice Talon à l’Elysée, le 5 mars 2018, qu’il a annoncé la création de cette mission-là, confiée à Bénédicte Savoy et Felwine Sarr. Je crois que c’est une bonne chose.

Sur la méthode, le rapport préconise une restitution d’Etat à Etat, c’est-à-dire un accord bilatéral de coopération culturelle entre l’Etat français et chaque Etat africain concerné. Est-ce que vous ne craignez pas des discussions interminables qui pourraient noyer le poisson ?

Non, ce que je peux vous dire, c’est que nous avons déjà reçu ici, à Cotonou, le président du musée du quai Branly. Stéphane Martin s’est rendu ici, il a pu se rendre compte de ce que nous avons prévu comme développement muséal dans le cadre de notre grand programme touristique. Et donc, je pense que la tonicité des deux présidents va influencer le processus pour ce qui concerne les échanges d’Etat à Etat. En tout cas, je reste confiant.

« La restitution des biens, c’est une bonne nouvelle. Mais attention, il faut les conditions, les infrastructures pour les accueillir ! » dit votre compatriote Didier Houénoudé, qui enseigne l’histoire de l’art à l’université de Cotonou. « Il y a des risques de vol, dit-il, des risques de disparition, de négligence ! »

Ce n’est pas tout à fait ce que dit Didier Houénoudé, mais je comprends cet aspect de la question. C’est pour cela qu’avant même de saisir le ministre français des Affaires étrangères de l’époque [Jean-Marc Ayrault], nous nous sommes assurés, au niveau du Bénin, de faire ce que l’on appelle notre home-work, notre travail, notre devoir de maison. Notre devoir de maison consiste à créer les conditions idéales de réception, mais aussi de conservation et de gestion. Nous avons sollicité les plus grands cabinets qui, dans ce domaine-là, savent comment créer des musées, comment créer les conditions de conservation. Il se trouve, par hasard, que les meilleurs que nous ayons trouvés étaient français. Et lorsque vous voyez ce qui est prévu en termes de développement muséal au Bénin, je peux vous dire que nous ne pouvons qu’être rassurés. Alors, s’agissant de la sécurité, la négligence et la mauvaise gestion ne font plus partie – ne font pas partie – du mode opératoire du gouvernement auquel j’appartiens.

En cas de vol, il est important de disposer d’un inventaire photographique complet, afin de rechercher l’objet volé et de le retrouver dans les ventes aux enchères. Alors, il y a dix-huit mois, vous avez dit à ce même micro à RFI que cet inventaire était en cours. Où est-ce que nous en sommes aujourd’hui ?

Nous avons beau essayer des recensements par la bonne volonté de certains acteurs, cela ne pourra jamais remplacer un inventaire qui sera décidé d’un commun accord. Et je pense que, dans le cadre de la commission mixte entre la France et le Bénin, nous allons déclencher un vrai inventaire. C’est une chose que nous prenons très au sérieux.

Selon le directeur du musée d’Abomey, il y a eu quelque 300 vols dans son musée ces dernières années. Alors, concrètement, est-ce que le musée d’Abomey va continuer de fonctionner avec seulement sept gardiens ?

Oui, j’ai déjà entendu cela. Vous avez bien dit tout à l’heure « ces dernières années ». Il ne vous a pas dit que cela s’est passé il y a quelques semaines ou il y a quelques mois. Des dispositions sont prises. Nous avons un comité de haut niveau qui est mis en place, présidé par un ancien directeur général adjoint de l’Unesco qui est Béninois, Nouréini Tidjani-Serpos. Donc, je peux vous dire que le musée d’Abomey tel que vous le voyez aujourd’hui va changer. Parce qu’il est prévu de bâtir un nouveau musée et c’est une priorité pour nous, dans cette démarche de restitution de biens et de coopération muséale.

Vous avez déjà chiffré l’effort budgétaire qui est nécessaire ?

Je peux vous dire que plusieurs millions d’euros ont été prévus, déjà affectés sur nos propres ressources pour la construction desdits musées. Les maquettes sont prêtes et nous serons heureux de vous montrer un peu tout cela.

Il n’y a pas que les quelque 70 000 pièces du quai Branly à Paris. Il y a les 70 000 autres pièces du British Museum à Londres, sans parler des pièces exposées à Berlin ou à Bruxelles, au musée Tervuren. Est-ce que vos partenaires africains et vous avez fait des démarches auprès de ces institutions et des Etats concernés ?

Il y a un certain nombre d’actions qui sont en cours dont je ne peux révéler encore les détails, puisque ce sont des discussions qui auront lieu parfois entre Etats ou parfois entre les institutions privées ou semi-privées. Je peux vous dire qu’il y en a même en Italie des caisses qui ont été rapportées par Savorgnan de Brazza et qui ne sont pas encore totalement ouvertes. Nous commençons par la France. Vous savez que certaines congrégations missionnaires conservent certains biens qui ont été arrachés dans le cadre d’une démarche de conversion religieuse, alors que c’était tout simplement des œuvres culturelles. Donc la France a le mérite d’être précurseur dans ce domaine. Je crois qu’Emmanuel Macron a eu le courage de poser l’acte qu’il a posé au mois de novembre 2017 à Ouagadougou et là, maintenant, cela ouvra la voie à un dialogue responsable.

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